✃ Comment êtes vous arrivé au Road's Hope Hospital? J'ai fait mon internat au Ronald Reagan Medical Center ainsi qu'une partie de ma résidence. J'ai choisi de venir au Road's Hope Hospital lorsque je me suis rendu compte que je ne voulais pas me spécialiser en pédiatrie mais en obstétrique, une spécialité qu'ils n'avaient pas au Reagan. Cela fait donc maintenant huit ans que je me balade dans les couloirs, le fait que ma soeur y fasse son propre internat et que quelques amis proches y travaillent déjà a évidemment joué dans mon choix.
   ✃ Quels sont vos pires et meilleurs souvenirs dans cet hôpital ? Le meilleur devait certainement être celui survenu peu de temps après la fin de ma résidence et de ma spécialisation, le jour où j'ai été promu titulaire en obstétrique, j'étais vraiment fier d'y être arrivé et impatient de me perfectionner dans le domaine. Le pire moment quant à lui revient trop souvent à mon goût, lorsque nous perdons nos patients, quand "tout ce qu'on pouvait faire" n'est pas assez, mais il y a plus frustrant encore, il y a ces cas impossibles, ceux pour qui on ne peut vraiment vraiment rien faire.
   ✃ Comment voyez vous votre avenir aujourd'hui? Je n'en sais rien. Je pensais que tout était tracé, que j'allais continuer d'évoluer en tant que médecin, trouver un objet de recherche, passer devant la commission, faire des essais, changer la médecine, trouver une place et un nom dans ce domaine, tout en vivant simplement à côté, toujours focalisé sur mon avenir professionnel. Aujourd'hui, j'ai un choix à faire, un choix qui pourrait bien chambouler cet avenir, ou au mieux, repousser tous ces projets de quelques années.

   
   


Ses parents n'ont jamais été présents pour lui, ça a toujours été Zoey et Andrew contre le reste du monde. Les études qu'il a faites et tout ce qu'il a accompli jusqu'à aujourd'hui, c'est pour lui qu'il l'a fait et pour personne d'autre. + Il est très fier de sa sœur et de la femme qu'elle est devenue, ils sont si proches tous les deux qu'on dirait des jumeaux qui interagissent ensemble. + Il a étudié la médecine à l'UCLA et a fait son internat au Ronald Reagan Medical Center + Il n'était vraiment pas attendu dans sa spécialité, beaucoup pensaient d'ailleurs qu'il serait plutôt dans la cardio ou la pédiatrie, mais les mystères des grossesses et des fœtus l'intriguent beaucoup plus et ont retenu son attention. + Il espère un jour pouvoir mener une grande recherche et être publié, et pourquoi pas gagner un prix concours. + Son métier est la seconde chose la plus importante dans sa vie, la première étant sa sœur, de qui il est très proche et pour qui il serait prêt à tout. + Il a dans sa garde robe cette veste en cuir qu'il détient depuis dix ans mais qui à ses yeux ne prend pas une ride et qu'il est toujours fier de porter. + Il raffole du petit-déjeuner, son moment préféré de la journée. Il y mange du sucré, du salé, du yaourt, des fruits, des céréales, à peu près tout ce qu'il peut engloutir. Malheureusement quand il travaille, il n'en profite pas vraiment, voilà pourquoi même quand il est de repos, il se lève de bonne heure pour remplir son estomac tel un roi. + Il est du genre à se lever le matin et enfiler la première chose qui lui passe sous la main. Les soirées pour lesquelles il doit faire attention à sa présentation sont vraiment un damne pour lui. + Il est célibataire mais ce n'est pas pour autant qu'il n'y a pas de femmes dans sa vie. Disons qu'il a ses petits arrangements sur base de non-attachement. + Il a l'habitude de faire rire son entourage, par ses mimiques, son humour léger et sa joie de vivre. On a parfois du mal à croire que c'est un gars sérieux d'ailleurs et pourtant, qu'est-ce qu'il peut l'être ! Dans sa vie professionnelle, il n'est pas du genre à prendre les choses à la légère. + Il aime beaucoup lire, il a une bibliothèque bien garnie, et pas seulement de référentiels anatomiques ou de revues de chirurgiens publiés. Il ne regarde que peu souvent la télévision et est au courant des infos via l'application de son téléphone. + Il peut se passer plusieurs jours avant qu'il ne se rende compte qu'il ne vous a pas répondu à votre dernier SMS, c'est très agaçant parfois, surtout si l'on sait qu'en prime il ne répond à son téléphone qu'une fois sur sept. Cette règle ne s'applique évidemment pas à son bipeur ! + Il ne sait pas danser, ce qui ne l'empêche pas de se ridiculiser quand-même après quelques bières.

« Andrew, j’ai besoin de ton avis à propos de Mme Stevenson, enceinte de cinq mois, atteinte d’un cancer des os. » Hopkins vient de me prendre en traitre à la sortie de la salle des prématurés. J’enlève la blouse stérile que j’avais du enfiler pour les quelques examens réalisés. Je ne lève qu’un œil en sa direction. Je dois dire qu’il ne semble pas être venu me trouver pour rien cette fois-ci, mais j’ai tellement de pain sur la planche que ça me paraît difficile en ce moment. « Pednekar, j’ai besoin que tu t’occupes de mes post-op’ ! » Le résident n’avait qu’à pas passer à ce moment-là à cet endroit-là. Il acquiesce d'un signe de tête. C’est déjà ça en moins. Je sens une lueur d’espoir passer dans les yeux du chef d’oncologie. « J’prends ça et puis j’arrive. » lui dis-je attrapant mon téléphone qui sonne depuis bien cinq minutes dans ma poche, sans relâche. Quand je laisse trainer en général, les gens abandonnent, mais là, ça a l’air important. « Docteur Clarke. » dis-je machinalement en décrochant, coinçant l’appareil entre ma joue et mon épaule.  « Monsieur Clarke ? Andrew Clarke ? Ici maitre Perkins, je suis notaire. » Je n’écoute que d’une oreille peu attentive la présentation de cet homme. En même temps, mes doigts tapotent l’écran de la tablette, complétant certaines données sur certains patients.  « Bonjour, c’est bien moi, qu’est-ce que je peux faire pour vous ? » Je prie silencieusement qu’il ne s’agisse pas à nouveau d’une énième histoire de plainte ou je ne sais quoi d’autre qui m’obligerait à aller voir le chef et l’avocat de l’hôpital. « J’aurais besoin de vous rencontrer, c’est à propos d’un dossier qui m’a été confié. » Ah bon ? Tu ne m’appelles pas juste pour me dire bonjour et me parler de la pluie et du beau temps ? Je soupire, prenant mon mal en patience, je n’a i pas le temps pour ça. Je repose la tablette dans la main d’une infirmière avant de commencer à me diriger vers les ascenseurs. « Un dossier qui concerne… ? Écoutez, je suis très occupé, c’est difficile pour moi de me libérer lors de vos heures d’ouvertures. » J’appuie sur le bouton pour appeler l’ascenseur alors qu’il est déjà allumé. Quand on sait qu’ils ne sont généralement disponibles qu’entre neuf et seize heures, comment est-ce que je suis supposé trouver une ouverture dans les jours à venir ? Le travail ne les tue pas ces gens-là. « On m’avait prévenu de cette éventualité. Je peux peut-être vous rencontrer sur votre lieu de travail ? » J’arque un sourcil, bien qu’il ne puisse le voir et monte de deux étages. Je suis surpris qu’il soit aussi conciliant mais je ne compte pas laisser passer l’opportunité. « Très bien, vous n’avez qu’à passer dans la fin de la semaine, vous pouvez me trouver au Road’s Hope. » À nouveau, je ne semble pas lui apprendre quelque chose de nouveau. Je mets fin à la conversation, non sans hâte mais poliment, et retrouve le chef d’oncologie dans son service, devant la chambre 2031.

Je sors de la salle d’opération et me dirige vers la salle d’attente principale pour informer le marie et la sœur de la patiente que tout s’est bien passé. Je suis crevé, lessivé et je l’avoue, j’aurais bien besoin de quelques heures de sommeil, ne serais-ce que quelques minutes aideraient à vrai dire. « Clarke, cet homme t’attend depuis deux heures déjà ! » Je relève le nez vers la chef des infirmières et souffle en tournant mon regard par-dessus mon épaule. L’homme est assez vieux, très proche de la retraite s’il ne l’a pas encore dépassée. C’est vrai, on m’avait prévenu qu’il m’attendait. Je finis par me décider à aller le voir tout en semblant occupé sur la tablette, m’informant déjà du dossier d’admission de ma prochaine patiente. « Je n’ai que deux minutes devant moi, Monsieur, en quoi puis-je vous aider ? » S’il a quelque chose à dire, qu’il aille droit au but, je n’ai pas de temps à perdre, sachant que chaque seconde perdue avec lui est une seconde en moins de sommeil. Il s’est relevé et me tend une main. « Maitre Perkins… » Je la lui serre, distrait, lève un sourcil. Ce nom ne me dit rien. « Le notaire. » Merde ! Je l’avais complètement oublié celui-là. J’ai envie de jeter un coup d’œil à ma montre mais j’évite. Cette fois-ci, je suis un peu plus attentif. « D’accord, j’ai peut-être un peu plus que deux minutes à vous consacrer. » Lui dis-je, comme tout d’un coup compréhensif face à l’attente que je lui ai fait subir. « Il y aurait-il un endroit où nous pourrions discuter ? » Je regarde autour de moi, la tablette dans une main, le stilet dans l’autre. Quoi ? Ce n’est pas bien dans ce couloir ? « Suivez-moi. » Son air a l’air plutôt grave et ça m’inquiète d’autant plus. J’ai vraiment du me fourrer dans une merde pas possible encore une fois. Ce qui me rassure jusqu’ici, c’est qu’il n’y a que moi qui ai été convoqué. Je l’amène à une salle de réunion, il prend place en bout de table, moi sur le coin en face de lui. Je m’installe dans le fauteuil sur roulette mais pas trop confortablement. Il ouvre sa mallette, en sort un dossier. Il me fait sérieusement flipper. Qu’il accouche, bordel ! Il me regarde d’un air sévère, ce qui a l’air naturel chez lui, mais j’y décèle également une pointe de compassion. Pourquoi ? « C’est à propos d’ Olivia Robins. » Ça y est, il a enfin lâché le morceau. Je me souviens très bien d’Olivia, je me suis occupé d’elle durant toute sa grossesse, ça doit dater d’il y a au moins deux ans, jusqu’à il y a un peu plus d’un an. « Pour ma défense, je n’ai plus vu Mademoiselle Robins depuis plus d’un an… » C’est automatique, je cherche aussitôt à me défendre. S’il lui est arrivé quelque chose, des séquelles d’une opération ou autre, ça ne peut pas surgir après autant d’années, si… ? « Je suis désolé de vous l’apprendre, Monsieur, mais elle est décédée dimanche dans un accident de voiture. » J’en ai le souffle coupé et une boule amère dans la gorge. Ce n’est donc pas ma faute. Mais elle est morte. Quel est le rapport avec moi ? Je ne peux pas me cacher que ça me touche, au fil des rendez-vous, j’avais construit un climat de confiance et d’amitié avec cette future maman, nous nous entendions bien et je passais la voir pour commencer mes journées, parce qu’elle me donnait le sourire. Le notaire poursuit, lisant l’incompréhension de la situation sur mon visage. « Vous saviez qu’elle vous avait nommé tuteur de son fils, Noah Robins ? » Si mes traits trahissaient mon incompréhension, c’est à présent mon corps tout entier qui semble se décomposer sous la nouvelle. « Je… Non… Pourquoi ?.. Pourquoi moi ? » Je bafouille, mes mots sont à peine audibles, je tente de démêler la situation, les dernières fois où nous nous sommes vu, les choses que l’on s’est dites. Jamais nous n’avions parlé de ça. C’est le genre de chose que l’on dit à la personne concernée, non ? « Il faut croire qu’elle vous faisait assez confiance que pour vous confier la chose la plus précieuse à ses yeux. » Tu ne veux pas encore plus dramatiser les choses, vieillard ? J’y crois pas. J’ai besoin de bouger. J’ai besoin de respirer. Comme si quelqu’un avait entendu mon appel, mon bipeur se met à sonner. J’y jette un coup d’œil avant de relever un regard navré vers le notaire. « Je suis vraiment désolé, mais je dois y aller. » Je m’exécute aussitôt et me lève. Le vieil homme sent que s’il a encore quelque chose à dire, il doit le faire vite. « Vous avez un mois pour vous décider, et je reste disponible si vous avez des questions. » Il fait glisser sa carte de visite sur la table en ma direction. Je la saisis avant de le regarder une dernière fois, toujours aussi perdu, avant de prendre la fuite. Oh putain c’est pas vrai… Il faut que j’en parle… Il faut que j’en parle à Zoey !